“
“
Je les étudiai pensivement, mais mon esprit s’acharnait encore à donner un sens à toute cette histoire et à démêler la vérité. Les rivalités au sein d’un lycée n’avaient rien d’anormal, c’était même quelque chose qui ne me surprenait guère. Je commençai à douter : quelle différence y avait-il entre ces personnes et moi ? Étaient-elles vraiment spéciales, ou bien avais-je été victime d’une blague de mauvais goût, comme je l’avais pensé ? Puisque personne ne surgissait pour me rassurer d’une bonne tape dans le dos que tout ceci n’était qu’un canular, il ne restait plus que deux solutions : soit la blague s’éternisait – ce qui était de mauvais augure –, soit Diana et Kat n’avaient rien inventé. Le comportement des élèves était pourtant tellement similaire à ce que j’avais l’habitude de voir ! Enfouir ma tête dans le sable et prétendre que tout était normal n’était peut-être pas la meilleure des tactiques, finalement. La situation n’avait rien de normal, j’en avais déjà plusieurs fois eu la preuve…
— Il faut que je vous pose une question, dis-je alors en fronçant les sourcils.
Ils m’étudièrent sans un mot.
— Qui êtes-vous ? finis-je par demander.
Je ne savais pas par où commencer, et faute de les ensevelir de questions dont je ne retiendrais probablement que la moitié des réponses, il me paraissait plus judicieux de débuter par celle-ci.
— Des êtres humains ? hasarda Kat en retenant un sourire.
Bien que ma question l’amuse, elle devait sentir que je n’étais pas plus rassurée que tout à l’heure.
— Nous n’allons pas te sauter dessus et te vider de ton sang, si c’est ce qui t’inquiète, ajouta-t-elle.
Ses cousins pouffèrent. Camilla, en revanche, ne trouvait pas cela spécialement drôle.
— Tu ne savais rien jusqu’à tout à l’heure, pas vrai ? devina-t-elle en me gratifiant d’un regard bienveillant.
Je secouai la tête en silence, tandis que les deux garçons en perdirent presque leurs mâchoires.
— Vraiment ? lâcha Alek en écarquillant les yeux.
— Tu aurais pu nous le dire plus tôt ! s’exclama Luka en se tournant vers sa cousine.
— Je n’y suis pour rien, je n’étais pas au courant non plus ! se défendit celle-ci en levant les mains. Diana ne m’en avait pas parlé.
— Qu’est-ce qui nous différencie, alors ? continuai-je.
— Nous possédons certains pouvoirs, révéla Camilla. Ce serait dur de l’expliquer simplement… mais à part ça, nous sommes des ados comme les autres.
— Comme les autres ?
— On vit dans un internat, on a une salle de jeux à disposition, on est libre d’appeler nos parents… complétèrent Alek et Luka.
— Tu as toujours du mal à y croire ? interrogea Kat. Si tu as besoin de hurler pour extérioriser la nouvelle…
— Je n’ai pas besoin de hurler, la contredis-je. J’aimerais juste comprendre comment tout ça peut être possible.
— Nous avons tous réagi différemment en le découvrant, poursuivit-elle. Lorsqu’on m’a appris ce que j’étais, ça a été la meilleure nouvelle de ma vie.
Je la fixai. Effectivement, tout le monde y réagissait à sa manière. Si elle avait éprouvé du soulagement en l’apprenant, j’avais en revanche l’impression de me retrouver dans un film. C’était… c’était déroutant. Je ne savais pas si je devais en rire, en pleurer ou bien prendre mes jambes à mon cou.
— Vos parents sont-ils au courant de ce que vous êtes ? les questionnai-je à nouveau.
Kat baissa les yeux.
— Bien sûr, me répondit Camilla avec douceur. Les miens me l’ont dit quand j’étais toute petite. J’imagine que ça ne doit pas être facile à vivre pour toi, mais ne t’inquiète pas.
Je déglutis. Elle paraissait si encline à m’apaiser que je sentis les pulsions contre mes tempes perdre peu à peu de leur intensité.